Comprendre la maladie de Batten

02.11.2011

Des expériences avec un gène de levure montrent ce qui ne va pas dans cette maladie infantile dégénérative

S’il est vrai que la gestion des déchets est partout un sujet important, il faut savoir qu’au niveau cellulaire, elle peut jouer un rôle de vie ou de mort. Une étude de l'Institut Weizmann, publiée dans le Journal of Cell Biology, vient de révéler que dans la maladie de Batten, trouble neurodégénératif mortel qui commence dans l’enfance, un récipient de déchets moléculaires déborde dans les cellules. Les résultats qui viennent d’être obtenus pourraient être à l’avenir à la base d’une thérapie pour cette maladie.

Dans la maladie de Batten, un pigment jaune insoluble s’accumule dans les neurones du cerveau, ce qui provoque la dégénérescence de ces cellules qui finissent par mourir. Les malades sont de plus en plus handicapés, ils perdent la vue et les habiletés motrices, et deviennent déficients mentaux. En général ils meurent avant l’âge de trente ans. On sait depuis plusieurs années que la maladie est due à une mutation du gène qu’on connaît sous le nom de CLN3, mais dont on n’avait pas compris jusqu’à présent le rôle dans les cellules. C’est justement ce rôle, expliquant le dysfonctionnement moléculaire dans la maladie de Batten, qui vient d’être découvert dans cette recherche effectuée à l'Institut Weizmann.

Les travaux ont été effectués dans le laboratoire du professeur Jeffrey Gerst du département de Génétique moléculaire par Rachel Kama et par le postdoctorant Vydehi Kanneganti, en collaboration avec le professeur Christian Ungermann de l'université d'Osnabrück (Allemagne). Toutes ces recherches ont été menées sur de la levure: en effet, l'équivalent dans la levure du gène CLN3 s'est conservé presque intact au cours de l'évolution, ce qui en a fait un modèle idéal pour la recherche. En effet, les gènes de la levure et ceux des mammifères se ressemblent au point que lorsque les chercheurs ont remplacé une copie manquante du gène de la levure par une copie du CLN3 du gène de mammifère, le fonctionnement normal de la cellule de levure a été rétabli.

Les expériences ont montré que l’équivalent dans la levure du gène CLN3 est impliqué dans le transport des protéines à l’intérieur des cellules – le terme scientifique étant « le trafic de protéines. » Le gène active une enzyme de la famille des kinases, qui à son tour lance une série d’événements moléculaires qui régulent le trafic. Lorsque le gène CLN3 de la levure est muté, le trafic est perturbé. Il s’ensuit que certaines protéines s’accumulent de manière anormale dans le lysosome, la machine de recyclage des déchets des cellules, au lieu d’être transportées vers une autre destination. A un certain point,  le lysosome se remplit au-delà de ses capacités, et il interfère avec les signaux moléculaires et avec d’autres processus vitaux dans les neurones, pour finalement tuer les cellules.

Il faudra encore beaucoup de recherches jusqu’à ce que ces résultats puissent permettre de soigner cette maladie, mais le fait d’avoir découvert le fonctionnement du CLN3 est justement ce qui va pouvoir aider à faire avancer les recherches vers de nouvelles thérapies. Remplacer le CLN3 défectueux dans tous les neurones du cerveau semble être un objectif inaccessible, mais remplacer son fonctionnement, comme activer la kinase adéquate à l’aide d’un médicament par exemple, pourrait un jour être possible.

 

La recherche du professeur Jeffrey Gerst est financée par : Miles and Kelly Nadal and Family Laboratory for Research in Molecular Genetics, Hugo and Valerie Ramniceanu Foundation, Y. Leon Benoziyo Institute for Molecular Medicine, Yeda-Sela Center for Basic Research, et la succession de Raymond Lapon.

Le professeur Gerst est titulaire de la chaire Besen-Brender de Microbiologie et parasitologie.

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