Une hormone qui assure son avenir

02.11.2011

Des chercheurs montrent la structure d’une zone du cerveau où des hormones régulatrices de processus vitaux du corps passent dans le sang

Une grande partie de la chimie du corps est contrôlée par le cerveau, de la tension artérielle à l’appétit et au métabolisme nutritionnel. Dans une étude qui vient d’être publiée dans la revue Developmental Cell, un groupe de recherche sous la direction du docteur Gil Levkowitz, de l'Institut Weizmann, a montré la structure exacte d’une zone importante du cerveau dans laquelle les commandes biochimiques sont transmises des cellules cérébrales vers la circulation sanguine, et de là au corps. Au cours de ce processus, ils ont découvert un rôle étonnant que joue « l’hormone de l’amour », montrant qu’elle aide au développement de cette structure cérébrale.

Cette zone, la neurohypophyse, est une interface entre les fibres nerveuses et les vaisseaux sanguins qui se trouvent à la base du cerveau. C’est là que se passent plusieurs interactions importantes cerveau-corps : des hormones sont libérées par les nerfs vers les vaisseaux sanguins régulant une série de processus vitaux du corps, ainsi que l’équilibre des fluides et les contractions utérines durant l’accouchement.

Bien que la neurohypophyse soit étudiée depuis plus d’une centaine d’années, les chercheurs qui ont effectué cette étude à l'Institut Weizmann ont développé de nouveaux outils génétiques qui leur ont permis d’examiner avec précision la disposition tridimensionnelle de cette structure cérébrale et d’apporter des éclaircissements sur les processus cellulaires et moléculaires qui conduisent à sa formation. Du fait que la neurohypophyse humaine est extrêmement complexe, les chercheurs ont effectué cette recherche sur des embryons vivants de poissons zèbres. Ces embryons sont transparents et sont un excellent modèle pour l’étude du cerveau de vertébrés car ils se prêtent avec une certaine facilité aux manipulations génétiques et permettent ainsi aux chercheurs d’observer au microscope la formation de la neurohypophyse.

Cette recherche a montré une nouvelle fonction surprenante de l’ocytocine, un messager hormonal surnommé « hormone de l’amour » car non seulement il a une influence sur l’appétit et sur les comportements reproducteurs féminins tels que l’allaitement, mais il est aussi impliqué dans les rapports mère-enfant et les relations du couple. Les chercheurs ont montré que l’ocytocine, l’une des deux hormones essentielles sécrétées dans la neurohypophyse de l’adulte, est impliquée dans le développement de cette zone du cerveau déjà dans l’embryon. A ce stade, l’ocytocine dirige la formation de nouveaux vaisseaux sanguins, et le docteur Levkowitz explique que « le messager aide à former la voie qui sera utilisée à l’avenir pour la transmission de ses propres messages. » La revue Developmental Cell a souligné les découvertes de cette recherche dans un preview intitulé : « L’hormone de l’amour attire un partenaire pour la vie. »

Ces résultats permettent de faire de grands progrès dans la recherche fondamentale car ils jettent une lumière sur les processus de base du cerveau, et ils pourraient même à l’avenir contribuer au traitement de maladies. Du fait que la neurohypophyse est l’une des rares parties du cerveau capables de se régénérer après un traumatisme, lorsqu’on réussira à comprendre comment il est formé, il sera peut-être possible de trouver le moyen de régénérer de même d’autres parties du système nerveux central.

Cette recherche a été effectuée dans le laboratoire du docteur Levkowitz, dans le département de Biologie moléculaire de la cellule, par le doctorant Amos Gutnick avec la docteur Janna Blechman. Les chercheurs de l'Institut Weizmann ont collaboré avec le docteur Jan Kaslin, de l'université Monash en Australie, avec les docteurs Lukas Herwig, Heinz-Georg Belting et Markus Affolter de l’université de Bâle (Suisse), et avec le docteur  Joshua L. Bonkowsky de l’université de Utah (Etats-Unis).

 

La recherche du docteur Gil Levkowitz est financée par la Dekker Foundation, par le Kirk Center for Childhood Cancer and Immunological Disorders, et par le Irwin Green Alzheimer’s Research Fund. Le docteur Levkowitz est titulaire de la chaire Tauro de recherche biomédicale.

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